Ils ont dit.....

                                              Marie-Louise

Et le verbe s’est fait chair… D’une moisson de mots et de notes de musique d’Yves Paganelli, une réalisatrice, Fabienne Prat pétrit une histoire du moulinage et se joue subtilement de la réalité, même si elle l’indispose. Un film qui joue cartes sur tables, avec deux versants ; l’un peuplé de faits, de témoignages, d’apports historiques avec des positions conciliantes et humaines, l’autre offert à la fée du logis, à l’imaginaire, en rupture radicale avec l’autre pente. L’art n’est-il pas basculement, déséquilibre ? Dans la fiction, une ouvrière, Marie-Louise est placée en usine pour ramener quatre sous à sa famille. Jean, un mécanicien, porté par le souffle de Jean Jaurès et nourri de l’affection de son patron, anarchiste avec des visées socialistes. Une idylle naît ; elle ne tarde pas à déranger d’autant que les deux tourtereaux n’hésitent pas à braver les interdictions. Le patron courroucé reçoit l’aide du préfet pour débarrasser l’endroit du gêneur. Il est envoyé sur le front. Il y mourra. Marie-Louise, enceinte, ne lui survivra pas. Elle repose désormais sous un tilleul. Une vie et le fil qui se rompt. Une Antigone humble, qui, à la différence de celle de Sophocle, a voulu vivre pour les vivants.  La chair de poule, au final.
                                                                                                       Gilbert Auzias



http://podcast.rcf.fr/emission/125121/181980


http://www.moulinages.fr/Affluence-a-Marcols-les-Eaux-pour


http://www.parc-monts-ardeche.fr/v1/article.php3?id_article=2737



St Symphorien sous Chomérac 10/12/2011


Marie-Louise : pour ne pas perdre le fil de notre histoire Ardéchoise

Atmosphère chaude, moulins assourdissants autour desquels "les petites
mains" travaillent... le fil de leur vie, car pour beaucoup d'ouvrières
la Fabrique pouvait représentait plusieurs décennies.

Voilà l'ambiance et le décor planté pour le tournage de Marie-Louise :
une réussite dûe au talent et à la sensibilité de Fabienne Prat qui a
su trouver les trésors oubliés que garde ce territoire de centre
Ardèche avec ses nombreux moulinages, temples de la mémoire locale.

Beaucoup d'émotions dans ces témoignages d'ouvrier(es) bouleversants
de sincérité, d'honnêteté et de joie malgré la "pénibilité" de leur
tâche ! On en voudrait même un peu plus dans le dosage
documentaire/fiction que présente le film !
Surtout lorsqu'on se trouve si près de Chomérac qui fût le berceau du
moulinage en Ardèche avec, comme nous l'a rappelé Yves Paganelli, la
construction de la Royale fin 18ème siècle, la première des 26
Fabriques que comptera ce bourg au 19ème.

Tout l'intérêt de M-Louise est qu'elle réveille les souvenirs, la
mémoire de ceux qui ont connu le moulinage, leur offrant l'occasion de
témoigner, de raconter et d'ouvrir le débat sur l'évolution des
conditions de travail de notre société.
A entendre les commentaires de la salle hier soir, nous avons tendance
à nous émouvoir sur le sort de ces moulinières et mécaniciens d'antan:
leur temps de travail, la surveillance, la paye et ses retraits pour
déchet, l'éducation promise, les conditions de logement...
Mais ces questions ne sont-elles pas toujours à l'ordre du jour? Nos
conditions de travail en 2011 sont-elles plus humaines et respectueuses
des personnes en tous lieux?
A lire les statistiques, le nombre de dépressions et de suicides donne la
réponse.
Et c'est là le second intérêt du film: il nous interpelle sur notre
propre vie, sur ce que nous acceptons de faire, ce que nous refusons de
dire, ce que nous voulons faire de nos vies...

Un grand merci à Yves Paganelli pour Marie-Louise qui nous accompagne
dans cette transmission du fil !
Mille mercis à Fabienne Prat pour son oreille attentive, son oeil
juste et ses qualités de coeur qui lui ont permis de réaliser un outil
culturel patrimonial fort dont avait besoin l'Ardèche pour ne pas oublier
ce qui fait la trame de toute son Histoire depuis plus de cinq siècles: la
SOIE.

Lixiane



Midi Libre, le mardi 21 février 2012 :

Dès le début du film, le talent de Fabienne Prat s'impose. Dans des images de bobines, câbles, fils, une question nous brûle les lèvres : objets inanimés, avez-vous donc une âme ? En même temps, la réalisatrice nous plonge dans un univers 'remodernisé', débarrassé de la poussière du temps. Machines et outils ne sont pas ceux, fatigués et morts que l'on trouve souvent dans les musées. Ils apparaissent tels que les ouvriers de l'époque les ont vus, d'une modernité révolutionnaire ! C'est grâce à ce climat d'une subtilité poétique remarquable, que les personnages nous semblent non pas désuets mais actuels. Ce film a été inspiré du livre d'Yves Paganelli Marie-Louise, petite ouvrière de la soie en 1914, dont le destin sera à jamais brisé. Rappelons qu'Yves Paganelli est un auteur-compositeur-interprète ardéchois très apprécié et connu dans le Dauphiné et au-delà.